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Domination des hommes sur les femmes

l’inconscient caractérisé par un “processus primaire” > différenciation morphologique apparente > différence sociologique “logique” > hiérarchie “naturelle” > conflits > revendications > progrès

 

Le stéréotype des femmes préhistoriques

Que savons-nous de la femme de la Préhistoire ? Dans le livre “Lady Sapiens”, trente-trois des plus grands spécialistes mondiaux (préhistoriens, anthropologues, archéologues, ethnologues, généticiens) tentent de répondre à la question dans une enquête inédite. Chapitre après chapitre, les idées reçues et les préjugés sont déconstruits, preuves à l’appui, afin de redonner à la femme de la Préhistoire toute sa place dans l’histoire de l’humanité. On la croyait faible et sans défense, on la découvre chasseresse, combative et puissante. L’étude des squelettes néandertaliens de sexe féminin montre souvent un bras avec une attache musculaire comparable à celle des hommes. Autrement dit, les femmes elles aussi pratiquaient le lancer lors des temps de chasse, explique Marylène Patou-Mathis, archéozoologue au musée de l’Homme.

On la pensait bestiale et primaire, la science révèle qu’elle maîtrisait de nombreux savoirs et prenait soin de son corps et de son apparence. On l’imaginait soumise, elle était respectée, honorée, vénérée…
Son souffle, ses pas, ses gestes retrouvés, nous invitent à redécouvrir l’histoire de nos origines. Une histoire sensible et plus juste de femmes et d’hommes unis dans une destinée commune dont nous sommes les héritiers.

Le message véhiculé par “Lady Sapiens” est donc qu’une femme impliquée dans de nombreuses activités du quotidien, indispensables à la survie des siens, ne saurait être infériorisée. Or cette vision là reste démentie par toute l’histoire des dominations de genre et, au-delà, de l’exploitation du travail. 

En réalité, dans la mesure où les lacunes de la documentation archéologique peuvent être éclairées par les observations ethnologiques, il est vraisemblable que les sociétés des sapiens du Paléolithique récent étaient marquées tant par la division sexuée du travail que par des niveaux plus ou moins élevés de domination masculine. Prétendre le contraire a sans aucun doute quelque chose de séduisant. Mais pour la science comme pour l’émancipation des femmes, les théories les plus séduisantes ne sont pas nécessairement les plus justes et, par conséquent, les plus utiles.

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 C’est une autre histoire : “L’origine du patriarcat”, Ft. Alex Ramirès (7:52)

Le dimorphisme sexuel

Présent chez la plupart des espèces, l’écart de taille entre hommes et femmes ne s’explique qu’en partie. Une anthropologue avance une hypothèse osée, liée à la compétition entre les sexes ! Un dimorphisme sexuel qui se retrouve également chez la plupart des espèces, même s’il n’est pas une règle absolue : dans bien des cas, chez les insectes, les oiseaux, les araignées, les poissons et même les mammifères, c’est la femelle la plus grande. L’exemple le plus spectaculaire étant celui de la baleine bleue : jusqu’à 33 m pour les plus grandes femelles, pour environ 25 m pour les mâles, ce qui en fait le plus grand mammifère terrestre. Autrement dit, le dimorphisme sexuel dont témoigne notre espèce n’est pas une loi intangible de la nature. Il pose même “un problème de taille” dès qu’il s’agit d’expliquer pourquoi les hommes sont en moyenne plus grands que les femmes… Au niveau de l’individu, cet écart s’installe à la puberté. Pendant l’enfance, garçons et filles grandissent à peu près au même rythme, c’est-à-dire de 5 cm par an en moyenne (croissance lente). A l’origine de cette différence physiologique, les scientifiques s’accordent à dire que la taille d’un individu est déterminée en partie par son génome et en partie par l’environnement dans lequel il a grandi.

Mais au niveau de l’espèce, la clé de cette différence de taille est à chercher du côté de l’évolution, via la sélection sexuelle. De fait, le dimorphisme sexuel de taille résulterait de deux lois. La première étant la “loi de la bataille” : les mâles s’affrontant pour s’accoupler avec un maximum de femelles, les grands costauds sont favorisés. La deuxième étant la “loi de la préférence”, selon laquelle les femelles choisissent les mâles en apparence les mieux pourvus pour assurer une descendance viable. Ce qui privilégie encore les grands.

Mains on doit y ajouter une troisième loi, celle d’une autre pression sélective qui est en jeu : la compétition entre hommes et femmes pour l’accès à la nourriture. Compétition dont l’homme sortait vainqueur, au détriment des femmes. En conséquence, les fillettes, moins bien nourries, voyaient leur croissance limitée. Une hypothèse que seules des analyses isotopiques d’ossements de la préhistoire pourraient confirmer. Auquel cas, la différence de taille entre hommes et femmes tiendrait à des millénaires d’inégalité alimentaire…

Un inconscient commun

Le rapt des femmes est une des réalités les plus banales de l’ethnologie. Il a été amplement documenté dans les populations de chasseurs-cueilleurs, traduisant l’existence de droits unilatéraux des hommes sur les femmes. Cette domination masculine, observée dans la grande majorité des sociétés humaines, s’exprime avec une vigueur toute particulière en matière de droits matrimoniaux et sexuels, le mari pouvant à sa guise prêter ou répudier sa femme, tandis qu’elle ne disposait d’aucune espèce de droit équivalent.

Bourdieu montre qu’il y a eu un long travail historique de reproduction de la “différenciation” des sexes, par le biais de la famille ou de l’enseignement. Et dans bien des sociétés la femme est infériorisée par une religion dont les secrets étaient interdits aux femmes. Il établit ainsi le caractère naturel et évident de l’origine de la domination masculine. Sans nier la violence physique liée à cette domination, Bourdieu analyse les effets de la violence symbolique et invisible dont sont victimes les femmes. Ces effets imposent des catégories qui sont construites du point de vue des dominants. Même si cette domination s’exerce sans aucune malveillance généralisée et explicite de la part des hommes, cette innocence et cette inconscience rend la domination d’autant plus difficile à combattre. Pour cette raison l’œuvre de Bourdieu est essentielle car elle met en lumière l’origine des structures inconscientes qui nous déterminent. Fondée sur la différence biologique entre le corps masculin et féminin, la différenciation sexuelle structure les différenciations sociales, dans l’organisation de l’espace, du temps, du travail…

Le féminisme

Une partielle reconnaissance de la femme remonte à l’antiquité, portée par les philosophes et poètes. Les épouses n’étaient pas toujours “objets de leur mari”, comme chez les nobles notamment, ou ces chefs, qui considéraient le genre féminin comme celui des simples servantes, indispensables pour leur donner des enfants et tenir leur maison, et dont l’utilité vient tout juste (selon Hésiode) après celle des bœufs de labour. La société était bien départagée, entre maîtres propriétaires et esclaves démunis, entre savants exclusifs et ignorants pléthoriques, entre militaires autoritaires et armée soumise, entre parents irresponsables et enfants fragiles, entre femmes corvéables et maris possessifs.

Le terme “féminisme” est un néologisme qui date de 1860, et à l’époque ce néologisme avait une connotation plutôt négative, à la croisée du médical et du politique. De par leur statut, certaines femmes ont cependant pu se montrer revendicatives de liberté, de reconnaissance, de partage du pouvoir. Dans “Lysistrala”, une pièce de 411, avant la fin de la guerre du Péloponnèse, on représente le singulier moyen qu’imaginent les femmes des deux camps pour contraindre leurs maris à conclure enfin la paix : se refuser à eux lors de leurs “courtes permissions” tant qu’ils n’auront pas promis de mettre fin à la guerre. Et en 392, “l’Assemblée des femmes”, est une comédie qui nous montre les femmes, lasses de voir la politique de leurs maris conduire l’État aux abîmes, décider de s’emparer elles-mêmes du pouvoir.

Mais les poètes comiques d’Athènes, comme nos chansonniers d’aujourd’hui, choisissaient de préférence les sujets d’actualité, ceux dont on parlait autour d’eux, ceux pour lesquels, au moment où ils écrivaient leurs pièces, leurs compatriotes se passionnaient. Le choix de tels sujets, à la charnière du Ve et du IVe siècle, est certainement un signe des temps. Platon, déjà, proclamait dans “La République” que les filles devraient recevoir, dans sa cité idéale, la même éducation, intellectuelle et physique, que les garçons, et il stipulait que les gouvernants seraient choisis parmi les femmes comme parmi les hommes. On pourrait y voir là un proto-féminisme, bien que Platon ne voyait encore la femme qu’un homme imparfait, n’ayant jamais rien signifié pour lui, ni pour son esprit ni pour son corps (Platon resta toujours célibataire).

L’évolution amorcée dès la fin du Ve siècle, en faveur d’une plus grande liberté et d’une plus grande dignité reconnues aux femmes suivait son cours. Au IVe siècle, surtout après la mort d’Alexandre, l’égalité des époux sera reconnue dans des contrats de mariage, et, d’autre part, les femmes seront juridiquement émancipées. Enfin ici ou là, les jeunes filles fréquenteront, au même titre que les garçons, les écoles primaires ou secondaires, et aussi la palestre et le gymnases. Sur le plan philosophique, il faudra attendre l’empire romain et Plutarque pour voir attribuer à l’amour des femmes les mêmes privilèges intellectuels et métaphysiques qu’à l’amour des garçons.

Au Moyen Âge, Christine de Pizan est la première écrivaine (hommes et femmes comprises) en France écrivant en langue française à pouvoir vivre de son métier d’écrivaine. Son œuvre, notamment “La Cité des Dames”, est écrite pour mettre en avant la grandeur et la valeur des femmes et de leur “matrimoine” à travers la description de femmes notoires considérées comme des modèles de courage et de vertu. La thèse du féminisme avant la lettre de Christine de Pizan est soutenue par les médiévistes Thérèse Moreau et Régine Pernoud, qui voit en elle une féministe, pour sa thèse “De l’égalité intellectuelle des hommes et des femmes dues à l’éducation et non pas à la nature”. Éliane Viennot souligne le rôle important de Christine de Pizan dans la défense des droits des femmes à son époque.

Mais la considération pour la femme, pouvant être reconnue à l’égale de l’homme, n’a lieu encore que dans certains milieux de pouvoir, les milieux du savoir. Elle reste particulièrement exclue dans la religion, et, aux temps de la Révolution française, malgré les contributions féminines à la rédaction des cahiers de doléances et le rôle que jouent les femmes du peuple parisien —notamment lors des manifestations d’octobre 1789 pour demander du pain et des armes —, les femmes ne se voient pas attribuer de droit particulier dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ; si le nouveau régime leur reconnaît une personnalité civile, elles n’auront pas encore le droit de vote à cette époque.

C’est au XIXe siècle que le mouvement féministe prend son essor et se développe dans les milieux socialistes de la génération romantique. Les féministes participent à l’abondante littérature de l’époque, favorisée par la levée de la censure sur la presse. Le combat des femmes rejoint celui des premiers défenseurs des ouvriers et des prolétaires, mais les femmes se mobilisent également contre le statut civil de la femme, soumise en matière juridique et financière à son mari. Ainsi par extension, la revendication pour le droit des femmes rejoint celle des classes populaires, comme en Allemagne où des revendications seront essentiellement économiques, tout en insistant sur l’éducation des femmes, leur indépendance économique dans le refus des mariages arrangés. Au États-Unis, le mouvement abolitionniste et l’émancipation des femmes sont étroitement imbriqués ; au Royaume-Uni, l’enseignement est dispensé aux jeunes filles de la bourgeoisie par des préceptrices, un des seuls métiers socialement acceptables pour les veuves et les jeunes filles issues de la bonne société. Éduquées et indépendantes, les femmes qui s’improvisent institutrices fournissent historiquement une part importante des effectifs militants féministes.

À l’issue de la première guerre mondiale, deux grandes tendances, héritières des débats du début du siècle, s’opposent : un féminisme “maternaliste”, dominante sur le continent et en particulier en France, et qui réclame des évolutions législatives qui protègent la spécificité des femmes dans un contexte de saignée démographique, et un féminisme “universaliste” qui au contraire milite pour la suppression de la puissance maritale.

A l’époque contemporaine, succédant aux premières générations de féministes des “suffragettes” du début du XXe siècle, vont suivre une deuxième génération dans les années 1960-1970, marquée par la revendication de la maîtrise de leur corps, puis d’une troisième vague amorcée dans les années 1990 avec l’exigence paritaire et le déploiement de la notion de genre, et aujourd’hui une quatrième vague qui, selon Chloé Delaume dans “Mes bien chères sœurs” en 2019, serait née dans les années 2010 et qui se serait formée avec les réseaux sociaux. C’est l’avènement de nombreux groupements se réclamant ou non du féminisme, mais qui témoignent combien les résistances restent profondément ancrées dans l’inconscient collectif d’une séparation des genres.

Obtention du droit de vote des femmes dans le monde, quelques dates :

Russie : 1917 / Angleterre, Canada : 1918 / 1928 (21 ans et plus) / États-Unis : 1920 / France : 1944 / Chine : 1949 / Suisse : 1971

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Géo Histoire : “Droits des femmes : des siècles de luttes et de progrès”

Des hommes qui deviennent des militants féministes

Si le féminisme a toujours été très majoritairement une affaire de femmes, pourtant, une certaine part des hommes sauront s’associer à ce mouvement. Plusieurs raisons. Au cours d’une première période, alors que les mouvements féministes de la première vague peinent encore à s’organiser, l’engagement des hommes apparait comme incontournable pour l’acquisition de droits par les femmes. Encore placées sous l’autorité de leur père ou de leur mari, ces dernières ne bénéficient pas d’une parole suffisamment légitime dans l’espace public pour porter seules leurs revendications. Le sociologue Alban Jacquemart retrace ainsi le parcours de Léon Richer, “père du féminisme français”, qui participe activement aux combats féministes dans la seconde partie du XIXe siècle, notamment à travers la fondation du journal “Le Droit des femmes” et de l’association du même nom. Dans “Les hommes dans les mouvements féministes, Socio-histoire d’un engagement improbable”, Alban Jacquemart, distingue deux grandes catégories d’hommes féministes. D’une part, les humanistes, que l’on peut retrouver aussi engagés dans d’autres combats comme l’anti-racisme, l’écologie ou la lutte contre les inégalités, émanant d’un militantisme construit au nom d’un individu universel abstrait. D’autre part, ceux qui mobilisent plutôt un registre identitaire, dont l’engagement est pensé comme un rejet du système de genre. 

Après 1945, les principales causes réformistes aboutissent : droit de vote et éligibilité des femmes, abolition de la prostitution réglementée ou encore inscription de l’égalité entre femmes et hommes dans la Constitution. Les revendications se transforment : les féministes de la deuxième vague qui émerge dans les années 1970 entendent désormais renverser le patriarcat et passer ainsi d’une égalité de droit à une égalité de fait. Dans ce contexte, les modalités de l’engagement des hommes sont modifiées. Le Mouvement de libération des femmes (MLF), fondé en 1970, estime ainsi que la non-mixité est nécessaire à la prise de conscience de l’oppression des femmes, et n’accepte l’engagement de quelques hommes que lorsque ces derniers acceptent sans discuter les conditions imposées par les militantes. C’est finalement le combat pour la légalisation de l’avortement, à partir de 1973, qui marque un renouveau pour la possibilité d’un engagement plus important d’hommes – très souvent médecins ou étudiants en médecine – dans les luttes féministes, et ce jusqu’à la fin des années 1970. 

Une fois la loi Veil votée, les mouvements féministes perdent progressivement de leur importance. De nombreux hommes se désengagent, et les militantes tentent de fédérer de nouveau autour de la non-mixité comme norme militante. Dans les années 1990, cependant, dans un champ féministe de plus en plus éclaté, de nouvelles associations, souvent étudiantes, sont créées et font le choix de la mixité pour renouveler le féminisme. L’engagement des hommes reste cependant variable, et demande toujours un certain nombre d’ajustements, notamment pour concilier mixité et contrôle politique des groupes par les femmes. Ce regain d’engagement par les hommes à propos de la question des inégalités entre les hommes et les femmes est essentiellement porté par ceux occupant des positions sociales dominantes. Ils sont souvent nombreux à avoir connu, dans leur entourage proche, une ou plusieurs femmes féministes, une socialisation primaire atypique pour des hommes, un père défaillant et/ou ont fait figure de fille manquante au sein de leur fratrie…

En fin de compte, Alban Jacquemart, en démontrant combien l’insignifiant statistique est sociologiquement significatif, contribue au développement d’une sociologie plus large des engagements militants.

Brève inventaire des acquis en France

585 : le Concile de Mâcon déclare que les femmes ont une âme

614 : un décret de Clotaire II interdit de marier les femmes contre leur gré

1555 : Marie Stuart dans un discours en latin devant la Cour dans le grand hall du Louvre à Paris affirme qu’une éducation dans les lettres est adéquate pour une femme

1622 : Marie de Gournay réclame, dans son “Égalité des hommes et des femmes”, un meilleur accès à l’instruction pour les femmes

1785 : “De l’éducation des femmes”, essai prônant l’égalité des droits de l’homme et de la femme

1791 : Olympe de Gouges publie sa “Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne”

1792 : une loi permet aux 2 conjoints de rompre leur mariage, soit par consentement mutuel, soit pour des causes imputables à un des époux

1836 : enseignement primaire pour les filles

1880 : enseignement secondaire autorisé pour les filles

1881 : création de l’Ecole Normale Supérieure de Sèvres, formant les professeurs femmes de l’enseignement secondaire féminin

1884 : loi sur le divorce, possible en cas d’adultère, de coups et blessures, ou de condamnation

1900 : l’école des Beaux-Arts s’ouvre aux femmes

1900 : les femmes participent pour le première fois aux Jeux Olympiques

1900 : une loi autorise les femmes à exercer la profession d’avocat

1907 : la loi institue que la femme mariée peut exercer une profession séparée, sauf opposition de son mari ; elle administre les revenus de son travail

1909 : congé de maternité de 8 semaines (mais sans traitement)

1920 : les femmes peuvent adhérer à un syndicat sans autorisation de leur mari

1931 : les femmes peuvent être élues juges

1938 : les femmes peuvent s’inscrire à l’université sans l’autorisation de leur mari

1944 : droit de vote et d’éligibilité par ordonnance (De Gaulle)

1946 : principe d’égalité entre les femmes et les hommes dans tous les domaines inscrit dans le préambule de la Constitution

1947 : Germaine Poinso-Chapuis, première femme nommée Ministre (de la Santé Publique et de la Population)

1964 : le Conseil National de l’Église Réformée de France déclare légitime les méthodes contraceptives

1966 : les femmes peuvent gérer leurs biens propres et exercer une activité professionnelle sans le consentement de leur mari

1967 : la loi autorise la contraception

1970 : “l’autorité parentale conjointe” est substituée à la notion de “chef de famille” du Code Civil

1970 : le service militaire devient accessible aux femmes sous la forme du volontariat

1972 : l’Ecole Polytechnique devient mixte : c’est une femme qui est majore de promotion

1972 : le principe de l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes pour les travaux de valeur égale est reconnu

1972 : l’école Polytechnique s’ouvre aux femmes

1974 : création du Secrétariat d’Etat à la Condition Féminine (Françoise GIROUD)

1974 : remboursement et vente libre aux mineurs des moyens de contraception

1975 : ouverture du premier lieu d’accueil pour femmes battues, à Clichy

1975 : obligation de mixité dans tous les établissements publics d’enseignement

1975 : loi Veil sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG)

1975 : le divorce “par consentement mutuel” est autorisé

1975 : toute discrimination sexiste à l’embauche est interdite

1980 : Yourcenar, première femme élue à l’Académie française

1980 : le viol est reconnu comme un crime par la loi

1982 : l’IVG est remboursée par la Sécurité sociale

1983 : la loi interdit toute discrimination en raison du sexe dans la vie professionnelle

1984 : on étudie la féminisation des titres et des fonctions

1985 : la loi institue l’égalité des époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs, et la transmission de leur nom

1998 : le Parlement, réuni en Congrès à Versailles, révise la Constitution prévoyant la parité hommes/femmes aux fonctions électives

1999 : le Congrès approuve la loi constitutionnelle permettant au législateur de prendre les mesures propres à favoriser l’égalité entre les femmes et les hommes

1999 : Carrère d’Encausse, première femme élue Secrétaire perpétuel de l’Académie française

1991 : Edith Cresson est la première femme nommée Premier Ministre

1993 : principe de l’exercice conjoint de l’autorité parentale à l’égard de tous les enfants, quelle que soit la situation des parents (mariés, concubins, divorcés, séparés)

2000 : la loi autorise la délivrance sans ordonnance des contraceptifs d’urgence

2000 : la loi garantit l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives

2001 : loi sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes

2004 : la loi relative au divorce prévoit l’éviction du conjoint violent du domicile conjugal afin de protéger les femmes victimes de violences

2005 : la loi en faveur des petites et moyennes entreprises rend obligatoire le choix d’un statut pour le conjoint collaborateur

2006 : loi relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes vise la suppression des écarts de rémunération

2006 : la loi renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs établit une égalité quant à l’âge légal du mariage : 18 ans pour les femmes et les hommes

2010 : le harcèlement moral est classé comme une violence conjugale et constitue un délit

2012 : instauration progressive d’un quota de 40% de femmes parmi les hauts fonctionnaires nommés

2013 : la loi interdisant aux femmes de porter le pantalon est abrogée

2014 : la “Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique” entre en vigueur

2017 : libération de la parole, PMA étendue aux couples de femmes

2020 : loi visant à protéger les victimes de violences conjugales

2021 : contraception gratuite pour les Françaises jusqu’à 25 ans

La France, porte-drapeau du féminisme dans le monde ?

Il ne faut pas s’y tromper, le féminisme trouve d’abord son origine à l’échelle personnelle. Car il s’agit avant tout de revendication de dignité, de liberté, de reconnaissance : ne pas se laisser écraser, faire entendre sa voix, se battre pour ses droits, tout en étant solidaire de l’autre. Le mouvement féministe conquiert donc peu à peu tous les territoires, toutes les couches de la société, tous les aspect de la vie sociale : droit de vote, contrôle des naissances, indépendance financière, liberté sexuelle, accès aux études, mixité dans l’entreprise, droit du travail, ce qui conduit in fine à la participation politique. Par cette conscience politique féministe diffuse et invisible, individuelle, les femmes sont sorties de leur mutisme et ont pris conscience de la nécessité des luttes sur le plan législatif. De ce mélange nouveau du privé et du public viendra se greffer le social sur l’institutionnel pour un changement culturel, dans un universalisme de la réflexion : passer de la praxis d’un “féminisme de survie” à un “féminisme politique”.

On pourrait se demander alors combien la loi ne précède-t-elle pas les mœurs, ou si ce ne sont pas les évolutions de mœurs qui provoque la création de lois. En réalité, comme il est difficile d’évaluer dans quelle mesure une législation est réellement mise en œuvre et de quels droits une femme fait réellement usage, il est certain que les deux procédés participent d’un même mouvement évolutif : la loi favorise la prise de conscience, et l’aspiration naturelle à réclamer toujours plus de justice légitime tous les combats.

Sur le plan mondial, on peu dire que les femmes françaises sont en tête pour certains acquis. Dans les conseils d’administration des entreprises françaises, elles sont aujourd’hui 30% ,faisant de la France “la meilleure élève de l’Union européenne dans ce domaine”. Et concernant l’égalité politique, la parité est vraiment une exception française, une révolution dans la gestion politique qui a provoqué un débat philosophique sur l’universalisme républicain.

Si les acquis du droit des femmes dans la société sont clairement continus et cumulatifs, il n’en reste pas moins que les combats doivent tout autant rester soutenus et intensifs pour en assurer la pérennité. Les freins au changements restent puissants, jusqu’à tenter de possibles remises en cause de certains acquis. Ainsi, dans le phénomène de mondialisation, à propos des inégalités hommes/femmes dans le développement, les chiffres indiquent qu’il y a une globalisation du sous-développement lié au sexe : analphabétisme, sous-développement culturel, économique ou politique, temps de travail, salaire… Le genre, qui définit la place sociale des femmes par la différence des sexes, est devenu une dimension structurelle de l’économie de marché à travers une mondialisation où le système marchand semble prendre aujourd’hui le relais de la division sexuelle du travail autrefois organisée par le patriarcat.

Extension mondiale du féminisme

Se développant dans différents pays du monde occidental à partir de la fin des années 1960, le mouvement des femmes a fait l’objet d’une reconnaissance internationale dès 1975, proclamée “année de la femme” par l’Organisation des Nations unies (ONU) qui organise, à Mexico, la première conférence pour les femmes. Le mouvement s’est ainsi étendu, organisé, mondialisé. La perspective de la fin de la guerre froide a permis de considérer que la troisième de ces conférences, celle de Nairobi, en 1985, marquait la naissance du féminisme mondial. Dix ans après (1995), la conférence de Pékin représente un nouveau tournant, elle marque l’apparition d’un discours officiel sur les droits des femmes parmi lesquels celui de contrôler leur propre existence. On y utilise aussi un nouveau concept, celui de “genre”, qui indique que les rapports entre les sexes ne dérivent pas de la biologie mais résultent bien d’une construction sociale, et qui incite donc à réévaluer les relations hommes-femmes.

Le discours des organisations internationales aussi bien que celui des premières années du mouvement féministe occidental prenait pour acquis que toutes les femmes étaient également dominées et qu’elles avaient donc des intérêts communs, même si par ailleurs il est mis en évidence les différences et les divisions existant entre les femmes, et la nécessité de prendre en compte la classe sociale, l’ethnicité, le passé colonial et ce qui en persiste.

Avec l’apparition de l’espace numérique, la parole féministe s’est fortement propagée. Une jeune génération d’activistes s’est emparée du Web et des réseaux sociaux pour défendre l’égalité entre les sexes. Cette parole participe d’un vaste mouvement social pour l’émancipation des femmes, très politisées envers toutes les questions touchant leurs droits et les discriminations qu’elles subissent. L’atout majeur de l’activisme numérique réside dans ce relais instantané des informations postées sur les réseaux sociaux qui permet un grand élargissement de la diffusion. Les ONG, les militants, les activistes sont nombreux à s’être saisis très tôt des outils numériques pour gagner en visibilité, pour partager leurs points de vue, pour amener une réflexion collective, pour s’organiser et mettre en place une action. 

Toutefois, cette jeune génération de féministes a majoritairement abandonné la matrice idéologique d’une transformation radicale de toute la société. À l’inverse de celles des années 1970 marquées par le courant marxiste-léniniste et par les écoles de critique sociale, les activistes du XXIe siècle font preuve d’un plus grand pragmatisme et concentrent leur énergie sur les luttes des femmes. Pour être moins intellectuel, leur engagement n’en est pas moins vigoureux. Il se manifeste aussi sur un mode plus ponctuel, selon les causes à défendre, à l’instar des mobilisations dans les autres mouvements sociaux.

Les défis pour l’avenir

La chute de la natalité en Occident mais aussi en Extrême-Orient entraîne un vieillissement très important des populations concernées, avec la perspective d’une diminution rapide. À la lumière des projections publiées par Eurostat en juin 2019, la démographe Michèle Tribalat montre que la population de l’Union européenne pourrait chuter de 512 millions d’habitants en 2018 à 408 millions en 2075 (sauf retournement spectaculaire et à supposer que l’immigration africaine et moyen-orientale s’interrompe).
Ajoutons que, sur environ 200 États enregistrés à l’ONU, une cinquantaine (20%) appartiennent à l’Europe et rassemblent 10% de la population mondiale cependant que deux États (l’Inde et la Chine) rassemblent 35% des humains. D’où ce paradoxe qu’une grande majorité d’États ont à ce jour aboli la peine de mort alors que les deux tiers des humains vivent dans des États qui l’appliquent ! Et lorsque l’on regarde les indicateurs sociaux actuels, comme ceux relatifs aux droits des femmes (avortement, polygamie, préférence pour les bébés mâles…) ou à la peine de mort, la réalité qu’ils montrent sont largement contre-intuitifs. Or, au milieu du XXIe siècle, quand les sexagénaires actuels ne seront plus là, la destinée de l’humanité sera entre les mains des enfants nés aujourd’hui, très majoritairement établis en Afrique subsaharienne et sur le pourtour de l’océan Indien. 

Si bien sûr il n’est pas possible d’énumérer toutes les femmes héroïques dans le monde, tant elles sont nombreuses, malgré le prix fort de bien des humiliations et souffrances, ce qui souligne à quel point leurs combats sont méritoires et exemplaires, les principes d’évolution vers plus d’humanité est bien réel. Mais si en occident le patriarcat rétrograde est aujourd’hui largement dépassé, il reste encore d’immenses zones d’ombres à l’échelle du monde marqué par de très fortes disparités. Un double défi reste entier : celui d’assurer la transmission intergénérationnelle, comme celui d’enseigner un universalisme égalitaire. 

Lady Sapiens – Thomas Cirotteau, Jennifer Kerner, Eric Pincas Lady Sapiens – Thomas Cirotteau, Jennifer Kerner, Eric PincasLady Sapiens – Thomas Cirotteau, Jennifer Kerner, Eric PincasLady Sapiens – Thomas Cirotteau, Jennifer Kerner, Eric PincasLady Sapiens – Thomas Cirotteau, Jennifer Kerner, Eric Pincas

https://www.science-et-vie.com/corps-et-sante/pourquoi-les-femmes-sont-elles-plus-petites-7885?utm_campaign=NL_ScienceetvieQuoti_31032022&utm_content=31032022&utm_medium=email&utm_source=EMAIL

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https://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1971_num_115_4_12697

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https://larevuedesmedias.ina.fr/le-web-et-les-reseaux-sociaux-derniere-vague-du-feminisme

https://www.herodote.net/Les_droits_des_femmes_sont_ils_en_progres_-article-2639.php